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LA CONJURATION D'UNE IMBECILE
26 avril 2009

C'est juste que je me laisse un peu pousser les envies

natalie_closer

Cela fait maintenant deux nuits que je peine à m'endormir à cause des battements de mon coeur.

Je ne sais pas trop ce que ça veut dire. Si je dois le prendre comme un signe de faiblesse ou bien comme un rappel.

Je n'ai pas non plus frôlé la mort mais je ne suis pas passée loin de dégâts irréversibles.

Comme la plupart des gens de mon âge, de surcroît parisiens, je sortais tous les soirs prendre « un » verre.

Bien évidemment, ce n'était pas du jus d'orange que l'on buvait.

Si encore c'était du bon vin.

Mais non, en bons étudiants toujours un peu fauchés, c'était plutôt de la belle piquette, un petit rouge sans saveur qui te reste bien sur l'estomac.

Et puis, tous les mercredis, du champagne au boulot, alors là, comme c'était un cran au dessus, autant se mettre une double dose.

Et se retrouver en piteux état tous les jeudis matins, devant des collègues dans le même état.

Pas très glorieux.

Mais sur le moment, on était si bien. J'étais tellement drôle quand j'étais saoule. Personne ne m'impressionnait, tout était envisageable.

Jamais je ne me suis demandée pourquoi.

Pourquoi j'avais besoin de ça pour passer une bonne soirée?

Là, de suite ça fait très moralisatrice, la fille en passe de devenir ennuyeuse n'est-ce pas.

Mais qu'est ce que je m'en fous.

J'ai compris ce que je fuyais.

Moi, tout simplement.

Il y a une semaine j'ai été admise aux urgences car je me suis retrouvée couverte de boutons.

Urticaire géant.

Je pensais bien sûr avoir encore mangé quelque chose qu'il ne fallait pas.

J'en avais déjà fait un il y a des années et on n'avait jamais su pourquoi.

Fallait que ça m'arrive, toute seule à l'étranger, et un dimanche sinon c'est pas drôle.

Piqûre de cortisone, je suis borgne mon oeil a triplé de volume, mais on me renvoie quand même chez moi, il y a trop de monde aux urgences.

Ca se calme, je suis un peu rassurée mais je me rappelle que la dernière fois, il n'y avait pas eu une crise mais deux à un jour d'intervalle.

Ca n'a pas manqué, le lendemain je me réveille couverte de plaques horribles, l'impression que ma gorge enfle et que je ne peux plus respirer.

Je décide d'aller dans un autre hopitâl, où effectivement on me soigne d'urgence.

Je passe la nuit sur un brancard dans un couloir, d'abord à côté d'une droguée en pleine overdose, ensuite en face d'une grand-mère à l'âge canonique qui a râlé toute la nuit, ce genre de râles ou perce déjà le bruit de la mort.

Pas de douche dans l'hôpital je garde mes vêtements qui me torturent. A côté de moi, une adolescente et sa mère qui dort à côté d'elle sur une pauvre chaise.

Je ne sais pas ce que je donnerais pour que la mienne soit là avec moi.

Ne pas pleurer quand les infirmières passent dix fois devant toi en faisant semblant de ne pas t'entendre quand tu les appelles.

Se souvenir des cours de Yoga et respirer, ça marche.

Le lendemain je ne vais pas mieux, mais j'ai de la visite.

Mes colocataires d'amour et une amie de la fac viennent me voir, les bras chargés de Cosmo (et de croissants cachés dans un pyjama parce qu'ici on ne me donne à manger qu'un bouillon infâme).

On rigole malgré tout. Parce que je sais que ça va bien finir par passer mais je suis inquiète, le médecin m'a dit qu'il y'avait quelque chose qui clochait avec mon foie.

A la fin de la journée, ils décident qu'on ne peut décemment pas laisser une touriste française en villégiature dans un couloir des urgences pendant plus de deux jours, on me transfère dans une clinique. Où j'aurai une chambre et une douche!

Savoir apprécier les petits bonheurs de la vie, c'est important.

J'arrive donc à la clinique des abdominaux. Assez rigolo comme nom, si ils pouvaient m'en prescrire un peu dans ma thérapie j'aurais pas perdu mon temps.

La chambre est mignonne et ma voisine est une mamie adorable. Renata a la pêche et elle m'empêche de déprimer complètement. Maman n'est pas là mais j'ai une mamie de substitution pour quelques jours.

Et puis d'un seul coup, je sens que j'ai très chaud, je vais me regarder dans le miroir et ce que je vois me fait très peur.

J'ai la bouche d'Angelina Jolie, ça c'est le bon point. Mais j'ai aussi la peau du patient anglais, ce qui est moins bien. Je hurle pour qu'on me montre à un médecin et là je rencontre le docteur génial. Parce que je n'ai jamais su son nom.

Il me demande de me calmer et puis je ne sais plus trop par quel cheminement, il me demande si je bois.

Je trouve la formulation quand même violente.

On demande pas à une fille de 23 ans si elle boit, on lui dit « tu sors beaucoup? » et c'est implicite non?

Sauf qu'on n'est pas là pour les faux-semblants.

Je lui dis que oui, pratiquement tous les soirs depuis presque deux ans.

Soupir.

Il me regarde droits dans les yeux et me demande si je veux ressembler à une clocharde d'ici dix ans?

Si je veux avoir une peau dégueulasse, un foie comme une éponge et une bonne dépression (tiens je connaissais pas ce cocktail)?

Je lui dis, sans façon.

Il me dit que je suis déprimée.

Je lui dis que j'ai juste une vie mondaine.

Il ne veut pas entendre raison.

Alors là je sais pas pourquoi je lui parle de papa.

Et je pleure, beaucoup.

Parce que le mot « déprimé » a le même effet sur moi que le fait qu'on touche les oreilles au frère de Mary.

Je deviens complètement hystérique.

Et encore il a pas dit dépressive sinon je lui aurais sauté à la gorge.

Déprimée donc, et il a l'air sûr de lui, le bougre.

Et peut-être qu'il n'a pas tort, tout dépend de comment on l'entend.

Pour moi à partir du moment où tu te lèves le matin et que tu es contente, c'est bon tu aimes la vie y a pas de problème.

Mais si on a peur de la nuit?

Si on confond le fait d'être une fille active avec la fuite en avant par peur de se retrouver seule avec soi même un instant?

La peur est un sentiment qui a dominé ma vie pendant trop longtemps, alors oui il fallait des palliatifs.

Des échappatoires, des mensonges, de la légèreté.

Je ne suis pas une fille légère, je ne l'ai jamais été. Gaie mais pas légère, ni mondaine.

Je suis sortie il y a deux jours et je me sens bien.

Je ne peux plus toucher une goutte d'alcool.

Mon foie, n'est pas touché par miracle.

Je suis consciente de la chance que j'ai.

Je n'incrimine personne, pas mes ex, pas Paris, pas mes amis.

Non, juste moi et mon manque de lucidité.

Je pensais que c'était ma plus grande qualité et pourtant je me suis bernée toute seule.

C'est un peu comme un nouveau monde à découvrir. Voir des gens la nuit, et être sobre. Savoir s'amuser quand même ne me semble pas insurmontable, juste naturel.

Et puis j'ai toujours le droit de fumer.

Étrangement, je n'en ai même plus tellement envie, ça me dégoûte.

C'est peut-être provisoire cette nouvelle sérénité.

J'ai plus envie d'excès.

Dans deux jours je pars en Sicile avec mes deux colocs, pour une semaine de convalescence les pieds dans l'eau. J'ai rencontré un garçon lors de ma dernière soirée de fille saoûle, je dois le revoir demain.

Ca vous semblera pathétique, mais ce sera la première fois depuis longtemps que je ne me bourre pas la gueule pour me donner du courage lors d'un premier rendez-vous.

Je vais essayer d'être moi, je vais me demander s'il me plaît vraiment et ne pas chercher à lui plaire à tout prix pour m'en lasser quelques jours plus tard.

J'ai envie de prendre les choses simplement, de ne rien brusquer.

Depuis que je suis sortie de hopitâl, je repense à ce mec médiocre qui m'a obsédé pendant ces six derniers mois. A ces tentatives désespérées de me faire aimer, par lui, par tous.

A ce temps perdu, à ces noeuds dans l'estomac avant de partir le matin, à ces nuits d'insomnies. Pour des garçons au final si peu pour moi.

J'ai envie de vrai.

Maman est venue me voir à l'hôpital et m'a dit une chose que je n'avais pas forcément réalisée.

Ces années passées avec lui qui me semblent maintenant tellement loin, c'est là où je me suis construite, pour ensuite tout détruire après. La boucle est bouclée, nouvelle phase. J'ai même pas hâte d'être au futur, je suis bien là tout de suite.

Cet article n'est pas sponsorisé par la rubrique « La main tendue » de Femme Actuelle.

Contrairement aux apparences.

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Commentaires
S
Merci, c'est le genre de commentaires qui donne envie de continuer à écrire "ici".
Y
Salut, on en se connait pas. Je suis tombé par hasard sur ta page via google. Elle m'a interpellé, et j'ai lu ton article entierement. Je dois avouer qu'il est très touchant et très bien écrit.<br /> Voila, je voulais juste te faire part de mes impressions, j'aime dire aux personnes quand elles font des choses bien.<br /> <br /> Yohann
L
Ca fait du bien de te lire.<br /> Même si c'est pas forcément bon signe.<br /> Même pas besoin de t'encourager, avec franchise, élan, et encore moins avec des mots pathétiques.<br /> T'as déjà tout capté.<br /> Alors, as usual... Je me contenterai de te REdire que, Paris, ça a moins de charme quand t'es pas là.<br /> Que tu me manques. Même si on s'est si peu 'connues'.<br /> Enjoy Roma darling...Et prends soin de toi.
LA CONJURATION D'UNE IMBECILE
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